Au commencement était le diagnostic (première partie)

Le diagnostic s’inscrit comme l’étape essentielle pour la personne Asperger. Diversement vécu, il peut être parfois une explication qui soulage, une délivrance, une justification mais aussi une fatalité source de dépression. Dr Mottron ose même le qualifier de thérapie en soi, mais il faudrait s’interroger si c’est inhérent au diagnostic, ou à tous les paramètres dus à l’existant en France et ailleurs (diagnostic retardé, délai de latence entre la demande et l’obtention).
Quoi qu’il en soit, l’autisme est beaucoup étudié et son diagnostic est l’un des plus sérieusement posés de tout le DSM. Aussi fidèle à sa structure en trois partie, le fameux triptyque, je développerai d’abord la procédure de diagnostic, ensuite j’exposerai rapidement les diverses reconnaissances possibles une fois cette étape franchie et enfin les diverses possibilités de soutien thérapeutique. Pour éviter la longueur, j’ai découpé le sujet en deux parties…

I) Le processus de diagnostic :

Ici ne sera évoqué que le diagnostic tel qu’il devrait être réalisé et tel qu’il est réalisé en général dans les CRA et centre expert. Aussi cette partie ne contiendra donc pas les élucubrations psychanalytiques (Rorschar), ni les questionnaires personnels (aspie-quiz, rdos). Les libéraux, outre le désavantage d’être seul à confirmer ou à infirmer l’autisme d’une personne, n’ont pas à leur disposition les échelles normalisées de l’autisme (ADOS, ADI) ou le personnel pour les mettre en œuvre.
Le diagnostic se décompose généralement en quatre étapes :
diag schéma1

Le diagnostic explore le passé et le présent, en effet certains « symptômes » auront tendance à disparaître. De plus, l’autisme n’est pas un trouble acquis, il est donc important de valider que l’autisme a toujours été présent au cours de la vie du patient. Dans tous les cas n’hésitez pas à consulter l’article suivant qui détaille les fonctionnements typiques de l’autisme Asperger selon le DSM: Autisme Asperger: approche théorique d’un spectre insaisissable

La procédure de diagnostic s’appuie sur les classifications pour constater les troubles notifiés dans le DSM/CIM. Quatre étapes président au diagnostic, hormis pour la première qui se déroule au début chronologiquement, l’ordonnancement des autres n’est pas obligatoire :

  • L’anamnèse avec un psychiatre : Cette étape marque l’entrée dans le processus, elle évalue aussi la pertinence de conduire un bilan ou de s’arrêter et d’infirmer directement l’autisme. L’histoire de la personne, l’altération notable de la vie socio-professionnelle doivent indiquer au spécialiste que le bilan est nécessaire pour investiguer plus avant et confirmer ou infirmer le TSA. Si cette étape est négative et la procédure terminée, c’est bien souvent que le psychiatre sait que l’ADOS sera négatif et que les bilans sont extrêmement douteux pour les CRA (coût largement supérieur à 1000€)
  • L’ADOS (Autism observation schedule) : Cet entretien semi-structuré standardisé vise à évaluer les habiletés sociales de communication, socialisation et de l’utilisation imaginative d’un matériel. Pour un adulte Asperger, la dernière version est préconisée, mais les autres versions peuvent servir aux enfants non verbaux. Quatre catégories sont évaluées la communication, l’interaction sociale réciproque, l’imagination/créativité, les comportements stéréotypés. Cet entretien est pertinent car les chiffres rapportés sont évalués en fonction des résultats obtenus par des personnes autistes, Asperger ou NT, ainsi un exemple issu de mon bilan :
    ADOS1Attention cependant, le fait que mon interaction soit si faible qu’elle est estimée au-dessus du seuil autisme, ne signifie absolument pas que je sois un autiste typique. L’évaluation ADOS choisie est celle de l’autisme verbal adulte sans DI*, et par ailleurs l’autisme typique s’inscrit dans un développement atypique fondé.diag schéma2
  • L’ADI-R (Autism Diagnostic Interview-Revised) : Cet entretien semi-structuré est réalisé par un psychologue clinicien avec l’aide des parents, d’un proche ayant connu le patient dans ses jeunes années, ou au pire à l’aide de documents (photos, carnets scolaires, livret médical). Il permet de reprendre l’histoire du développement de l’enfant en considérant ses anomalies dans 3 thématiques, les anomalies quantitatives de la communication, les comportements restreints et stéréotypés, les anomalies du développement avant 36 mois. Outre son objectivité cet entretien a l’avantage de rechercher dans le passé ce qui pourrait ne plus être visible dans l’état actuel. Ainsi les personnes qui aujourd’hui disent énormément compenser ne pourront être que repérer à ce moment du bilan.ADIR
  • WAIS (Weschler Adult Intelligence Scale-IV) + praxie gestuelle. Ce test est une batterie de tests permettant d’évaluer un indice d’efficience intellectuelle cognitive globale d’un sujet. L’échelle se compose de quatre sous-indices : l’indice de compréhension verbale (raisonnement verbal et connaissances générales), l’indice de raisonnement perceptif, l’indice de mémoire de travail et l’indice de vitesse de traitement de l’information. Je ne souhaite pas développer ce test mais une recherche google devrait vous donner les clés de sa compréhension. Sachez cependant que s’il n’y a pas de profil cognitif typiquement Asperger, un QI hétérogène non interprétable est souvent notifié avec une compréhension verbale bien au-dessus de l’indice de raisonnement perceptif dans le cadre de la classification syndrome d’Asperger (CIM10/DSM4).

Je n’ai pas ajouté, les divers tests potentiels pour les comorbidités de type TDAH*, dyspraxie*, qui peuvent souligner d’éventuelles comorbidités*. Dans tous les cas, contrairement à bien d’autres diagnostics (bipolarité, schizophrénie), l’autisme se fonde sur des échelles factuelles, où la subjectivité du praticien a peu sa place.

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LA SUITE EST ICI : Puis vinrent la reconnaissance et le soutien 

Un article qui reprend les différents champs de l’autisme est disponible ici:
Cartographier l’autisme en schémas pour mieux l’accompagner :

* voir Petit lexique rapide

6 Comments

  1. Bonjour,

    Je suspecte sérieusement d’être autiste depuis plusieurs semaines. Je pense que je veux faire les démarches de diagnostic, mais je ne suis plus en contact avec mes parents et mon frère qui étaient ma seule famille (et pour des raisons personnelles je ne veux sous aucun prétexte les revoir ou les contacter ou les mêler à ma vie d’une quelconque façon). J’ai aussi perdu tous mes documents scolaires avant le bac et mon carnet de santé. Est-ce un obstacle majeur à la procédure ?
    Je ne sais pas évaluer mon degré de compensation mais je réalise que ça me fatigue beaucoup, et avec ce nouveau regard, je me demande si mon comportement « naturel » est légitime. Comme je n’ai pas de moyen de comparer, c’est impossible de savoir ce qu’il est normal de compenser ou du moins ce pour quoi il est normal de se forcer et à quel degré.

    Merci

    • Ce n’est pas un obstacle majeur, mais il est vrai qu’en général, les équipes aiment valider la permanence des « atypies » dans l’enfance. Peut-être, amis d’enfance si vous en avez eu, ou sinon pas mal de lieux de diagnostics font sans.
      Il est possible dans un diagnostic retardé de ne plus avoir de parents, en pareil cas, il faut agir autrement. Il est normal de ne pas savoir si quelque chose est naturel ou différent de la norme, pour ma part, je pensais que beaucoup de gens agissaient comme moi, n’ayant pas de recul et ayant peu de miroir social.

      Bon courage, pour cette procédure longue mais qui j’espère répondra à vos questions.

  2. Merci pour cet article et toutes ces ressources détaillées et hyper intéressantes.

    Pour faire reconnaître ce handicap, la toute première étape consiste-t-elle à aller voir un psychiatre spécialisé Asperger (ou autisme) ou bien aller plutôt dans un Centre Ressources Autisme ?

    Est-ce qu’il y a beaucoup de sous à sortir ? Une partie peut-elle être prise en charge par la sécu ?

    Merci encore

  3. Merci pour cet article et toutes ces ressources détaillées et hyper intéressantes.

    Pour faire reconnaître ce handicap, la toute première étape consiste-t-elle à aller voir un psychiatre spécialisé Asperger (ou autisme) ou bien aller plutôt dans un Centre Ressources Autisme ?

    Est-ce qu’il y a beaucoup de sous à sortir ? Une partie peut-elle être prise en charge par la sécu ?

    Merci encore

  4. bonjour, mon fils de 14 ans été pré-diagnostiqué autiste asperger en 2018; il passera un ADI-R et un ADOS fin 2019 pour confirmer ce diagnostic; je recherche des informations concernant la prise en charge financière de ces 2 tests reconnus par la HAS et concernant l’ensemble des aides existantes ou en projet (4ème plan autisme) pour diagnostiquer, accompagner (habileté sociale), coacher (études et recherche d’emploi) un adolescent aspie en France, cordialement, Florian

    • Prise en charge pour un diagnostic en libéral? Je crois qu’il est possible de faire une demande exceptionnelle, mais je ne sais si elle est accordée facilement surtout que les CRA sont pris en charge.

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