Avec une mortalité précoce de 2 à 4 fois supérieure selon les études, et une espérance de vie réduite de plus de 15 ans, il était important de traiter le sujet des soins somatiques dans l’autisme. Ce sujet, de nombreux acteurs ont commencé à s’en emparer depuis quelques années, et aujourd’hui le parcours de santé est évoqué dans les recommandations HAS. Hélas trop souvent il n’est évoqué que dans le curatif et très peu en préventif.
Ce sujet, concerne tout le spectre et ici, je ne différencie pas l’accompagnement des personnes autistes les plus autonomes, des moins autonomes. Fidèle à mon plan en trois parties, j’évoquerai d’abord le constat sur la santé des personnes autistes, ensuite les besoins spécifiques et enfin les solutions préconisées.
N’hésitez pas à retrouver les ressources utiles en fin d’article et à cliquer sur les cartes mentales pour mieux les visualiser.
I) Soins somatiques et TSA : Un constat dramatique
Après réflexion avec des parents, je tiens à souligner un fait, cette partie dédiée n’est nullement là pour peiner ou effrayer les parents, c’est juste pour souligner l’ampleur des problématiques et tenter de réduire les écarts avec la population typique sur les problèmes de soins somatiques. Avec une meilleure adaptation, comme celle que beaucoup d’acteurs préconisent, certains écarts se réduiraient.
Quelques données clés :
- la réduction de l’espérance de vie est de 17 ans pour les personnes autistes et jusqu’à 30 ans pour celles non verbales :
https://www.autistica.org.uk/downloads/files/Personal-tragedies-public-crisis-ONLINE.pdf#asset:1499 - La mortalité prématurée est de 3 à 10 fois plus élevée que dans la population typique
- 30% des personnes autistes dîtes à haut niveau (ex AHN,Asperger) ne reçoivent pas les soins appropriés.
- Beaucoup de diagnostics médicaux sont retardés et conduisent à cette surmortalité elevée : http://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/1088357612450049
J’ai repris ici un extrait de l’article d’Amélie Tsaag Varlen que je remercie en passant pour son autorisation : «
Les études cohorte sur le sujet, entre autres celle des Suédois Hirkivoski et al. publiée en 2016, citent :
- Les maladies cardiaques et circulatoires (dues notamment au mode de vie sédentaire et à la détérioration des artères par l’anxiété chronique)
- Les tentatives de suicide réussies (représentant la première cause de mortalité précoce)
- Les crises d’épilepsie
- Les maladies respiratoires (pneumonie, asthme)
- Les néoplasmes (cancers)
- Les blessures que des personnes autistes s’infligent elles-mêmes, en particulier à la tête. »
Je me suis permis de reprendre son graphique adapté de SpectrumNews
Beaucoup de maladies sont liées à un retard de diagnostic, soit :
- les examens de contrôle n’ont pas été réalisés, la médecine préventive étant peu développée dans le TSA
- la problématique comportementale dans les examens et soins
- Enfin le fait que l’autisme a tendance à masquer les troubles somatiques, car très souvent on impute à l’autisme le changement de comportement.
Aujourd’hui de nombreuses personnes autistes ainsi que des professionnels travaillent sur cette thématique, mais souvent la vision essentiellement curative. Il est tout autant important, de développer l’aspect préventif.
II) Des spécificités liées à l’autisme
Avant toute chose je tiens à signaler qu’il ne s’agit pas d’accabler les soignants, mais ici d’évoquer d’abord les difficultés et les solutions. Quelques points notables qui défavorisent une bonne prise en charge :
- La désertification médicale, avec des délais d’attente, peu de temps pour chaque patient.
- Difficultés à trouver un spécialiste, il faut attendre des mois dans le public ou tenter d’obtenir un rendez-vous par cooptation
- Les sous-effectifs dans l’hospitalier
- La tarification à l’acte qui fait que des accompagnements adaptés et donc plus longs ne sont pas mieux remboursés et donc sont plus coûteux pour les hôpitaux.
- Refus d’une patientèle autiste par certains professionnels qui redirigent vers les urgences.
Avec Marina Petit, nous avons décidé de diviser en 5 groupes, les spécificités de l’accès aux soins dans l’autisme :
- Les spécificités médicales liées à la condition neurologique particulière
- L’accueil et ce qui peut faire obstacle à une bonne prise en charge
- Les perceptions qui peuvent rendre difficiles l’accès à un diagnostic ou à des soins: n’hésitez pas à consulter cet article: L’Autisme dans tous les sens
- Les difficultés propres aux soins
- Les comportements problématiques
Je ne peux tout développer, mais sachez qu’avant tout un soin chez une personne TSA se prépare et bien en amont. Aussi n’hésitez pas à téléphoner, prévenir aussi bien la personne TSA que le personnel. Quand il y a urgence, cela n’est guère possible, mais tentez dans la mesure du possible d’encourager le personnel à réagir.
Deux grosses problématiques ressortent, d’abord le cloisonnement des spécialités, c’est à dire l’absence de coordination entre les différents services. L’autre problématique est l’attribution des comportements « problèmes » à l’autisme, c’est à dire ne pas chercher si ces comportements sont le signe d’une douleur. Face à un comportement nouveau d’agression ou d’hétéro-agression, il convient d’écarter la piste médicale, ensuite la piste sensorielle, avant d’agir sur le comportement proprement dit. Cette échelle développée, il me semble, par monsieur Djéa Saravane devrait vous y aider:
ESDDA
III) Les solutions face aux difficultés
J’ai décidé pour cette carte mentale de ne pas me limiter qu’à l’aspect parents/personnes autistes mais proposer des solutions aussi aux soignants. Etant entendu, qu’évidemment, mon pouvoir décisionnel est faible.
Là encore, la division s’opère en 5 problématiques, même si la discrimination est parfois difficile, par exemple l’usage de pictogramme se prépare en préventif mais suit l’adulte ou l’enfant dans l’accueil et dans les soins:
- Adapter l’accueil : Il est important d’anticiper le moment d’examen ou d’hospitalisation grâce notamment au site Santé-BD.org ou à l’association sparadap qui offrent des scénarios sociaux visuels adaptés à la personne autiste. Pour préparer la personne autiste, il faut idéalement, se rendre sur les lieux avec elle ou les filmer. Par ailleurs, aucune échelle ne peut être utilisée si elle n’a pas été préparée, connue préalablement, aussi il faut les utiliser « quand tout va bien ».Il est aussi important de tenir compte des spécificités de communication aussi pour les personnes autistes verbales, il faut être explicite et aussi pédagogue.
- Adapter les soins (tant par l’utilisation de matériel spécifique que dans les modalités d’intervention). Le Méopa est ce qu’on nomme trivialement, le gaz hilarant et qui a tendance à calmer la personne autiste. Le patch Emla atténue les douleurs de la prise de sang.
- Prendre en compte la douleur par l’utilisation d’échelles normalisées utilisées préalablement, ne pas hésiter à tenir compte du sensoriel qui doit guider dans cette évaluation.
- Prévenir et préparer : ici il s’agit de mesure prophylactique destinée à prévenir les difficultés des soins. Enfin il faut favoriser un bon suivi médical, et ainsi pratiquer les examens classiques comme par exemple les dépistages et spécifiques liés aux traitements et comorbidités. Trop souvent, dans les MAS, les femmes autistes de 40 ans ne font pas de mammographies, et même les personnes plus autonome ont du mal à suivre leur autonomie santé.
- Bénéficier d’une coordination entre les différents acteurs: Les parents connaissent leur enfant (même majeur) et ont souvent appris à communiquer avec, il faut donc une collaboration étroite entre les soignants et les parents. Ainsi ils peuvent identifier des idiosyncrasies connues (c’est-à-dire des mots inconnus désignant des objets émotions). Les parents peuvent être aussi une source de réconfort, comme les accompagnants habituels. Pour des personnes autistes plus autonomes comme moi, accepter le compagnon ou la compagne pendant l’examen peut permettre d’aider à la verbalisation de la douleur.
Le risque inhérent à un examen raté, c’est encore plus de retard au diagnostic, un essoufflement de la famille, mais aussi une sur-généralisation de l’expérience négative pour la personne TSA qui n’aura plus envie du tout de s’y rendre, ce qui peut maximiser les problèmes comportementaux ou les angoisses.
Une aide de mon amie Angélique:Rencontrer un nouveau professionnel de santé
Conclusion : J’espère avoir permis une sensibilisation aux soins somatiques et TSA, cet article n’entend pas balayer un sujet si vaste avec des profils très variés où ce qui fonctionne dans un cas ne fonctionnera pas dans l’autre. Toutefois, si à terme, des réseaux spécialisés mais aussi une sensibilisation ne se fait pas dans le milieu médical, le problème perdurera. Aujourd’hui déjà certains parents ne sont plus reçus par des dentistes ou généralistes à cause du TSA de leur enfant. Ce problème crée une sur-mortalité des personnes autistes et ce problème n’est pas du tout réglé par le 4eme plan autisme
Une infographie sur le sujet:
N’hésitez pas à partager vos expériences en commentaire ou sur notre facebook:
https://www.facebook.com/Aspieconseil/
Remerciements : Angélique https://autismeautonomie.wordpress.com
Marina Petit : Pour la réalisation des cartes mentales
Madame Roux: Infimière au CRA du Centre pour sa sensibilisation lors de la formation à l’ERTS
Djéa Saravane : Pour sa forte implication dans ce problème, dont voici un powerpoint sur le sujet Formation de Monsieur Saravane pour Autisme France
Mathilde , Caroline, Nathalie, chitina, Zoé pour son préambule, et tant d’autres.
Sites utiles:
Un très bon site pour préparer une hospitalisation: http://www.santebd.org/
Un autre du même genre: https://www.sparadrap.org/
Les échelles :
Une échelle auto-évaluation:
Partie du corps:
http://www.autisme-ressources-lr.fr/IMG/pdf/support-visuel-montrer-ou-j-ai-mal-01.pdf
Intensité et un outil complet du blog Hoptoys:
https://www.bloghoptoys.fr/douleur-3-outils-a-telecharger-pour-en-parler-avec-les-enfants
Une application : https://play.google.com/store/apps/details?id=net.ctexdev.dolorisV2
Echelle hétéro évaluation:
Une échelle dédiée à l’autisme : ESDDA
Une échelle pour les personnes ne sachant pas s’évaluer : NCCPC
D’autres moins spécifiques:
La San salvadour
Très bon article et aide précieuse pour les professionnels souvent démunis …
Bravo pour le site en général et cet article en particulier !
Sur 3 médecins, mon fils de 28 ans, aspie reconnu (et revendiqué), a eu deux consultations très productives (rhumato+spécialiste maladies infectieuses) et vécu un flop xxxl avec le doc du centre anti-douleur,(qu’il est allé consulter suite à un accident d’il y a 10 ans qui l’a transformé en douloureux chronique), s’est fait renvoyer dans ses foyers avec un médoc contre les maux de tête… Cherchez l’erreur ! Et il a attendu ce rv … un an !!!
Bref, je sais que c’est fréquent, mais ça reste révoltant car inacceptable !
Bon courage à tous!
Chris
Merci de parler de ce sujet qui m’intéresse dans mon projet , je vais le partager sur le site de mon association et cela permettra aux familles de découvrir le reste, car très bien documenté.