Autisme et Situations malveillantes

Les biographies, les études montrent que les risques de brimades et de harcèlements sont deux à quatre fois plus importants dans la population autiste par rapport à la population typique. Ce sujet sera traité en trois phases, d’abord un premier article (celui-ci ndlr) sur l’identification, un autre sur la gestion, et enfin le troisième et dernier sur la prévention des situations de malveillance.

J’avais donc envie de traiter ce sujet pour plusieurs raisons, d’abord parce que je fus souvent victime de violence (de l’école jusqu’à ma vie d’adulte comprise, au travail et même naguère en couple). Je voulais aussi démontrer que le travail sur les habiletés sociales ne se limite pas du tout à quelque chose de déconnecté du quotidien, qui consisterait à savoir comment exprimer de l’empathie en mode clinique . Cette première partie est à mon sens la plus importante car elle mettra en fonctionnement les suivantes: Si vous ne savez pas identifier que vous êtes dans une situation malveillante, vous ne pourrez mettre en marche des solutions et éventuellement les prévenir dans le futur.

Cette première partie sera elle-même déclinée en triptyque, elle présentera d’abord des exemples courants de situation de malveillance et expliquer leur omniprésence dans l’autiste, ensuite quelques idées pour définir les situations de malveillance et enfin des moyens d’identifier les situations sociales malveillantes notamment via un questionnaire (un triptyque au carré en somme) .

  1. Autisme et malveillance :

Beaucoup de personnes autistes dont moi-même ont eu au cours de leur vie une misanthropie farouche due à une généralisation d’expériences négatives. Souvent, il ne s’agissait pas de surgénéraliser mais de se sentir à force de souffrances, comme «  un aimant à injustice ». Je pense à toi mon amie Caroline. J’en suis parfois venu à exécrer les autres et à penser que ceux-ci répéraient en moi quelques failles, avec toute la culpabilisation que cela fait porter.

Avant de parler du rapport de l’autisme à la malveillance, je voulais citer quelques exemples donnés par des personnes autistes y compris moi :

  •   Je me suis retrouvé(e) en couple presque un an avec une personne avec qui je ne voulais pas vivre, qui était mon supérieur au boulot, parce que j’ai pensé qu il voulait être mon ami et je ne l’avais pas du tout vu venir. Du coup, violence conjugale, souffrance et harcèlement
  • Moins grave, j’ai appris à dire aux vendeurs en porte à porte que je n’avais pas d’argent. Et un jour il y en a un qui a sorti un lecteur de carte et je n’ai pas su dire non
  • « ’ai vécu des années de harcèlement avec menaces croyant que tout était normal, même si j’avais des signes physiques et anxieux évidents
  • A l’école, dès que j’arrivais, on me tapait dessus, y compris même devant les surveillants qui s’en fichaient éperdument
  • Mon ex compagne m’a envoyé un objet et j’ai eu quelques points de suture, le médecin lui a fait un mini sermont
  • J’ai été violée parce que je n’avais pas compris l’allusion « prendre un dernier verre »
  • Des jeunes ados se moquent de mon fils autiste et miment des stéréotypies

 

On voit par exemple que de nombreuses fois, il y a le critère d’incompréhension de la volonté d’autrui (L’empathie et l’autisme, aux sources scientifiques du conflit (I)) ou d’incompréhension sur ses propres ressentis, voici quelques explications qui peuvent expliquer la grande présence de la malveillance subie chez les personnes autistes :

  • Un manque de compréhension des implicites qui conduit à une sorte de naïveté sociale
  • Une difficulté à décoder le langage corporel et compréhension des contextes
  • Un manque d’exposition sociale et d’amis qui peuvent apporter un recul sur une situation
  • Une estime de soi dégradée
  • Une difficulté de ressentir les émotions, et sensorialités physiques qui permettent d’identifier la situation
  • Une faible capacité à savoir refuser, à cause d’un social en retrait
  • La sidération, la culpabilité (qui ne sont pas propres à l’autisme)

Par exemple « prendre un dernier verre chez quelqu’un » semble signifier une proposition d’acte sexuel. Aussi pour répondre il ne faut pas évaluer si nous avons soif et que dès lors nous pourrions prendre ou non un verre en fonction de notre besoin de se désaltérer, mais bien évaluer l’implicite de la proposition. De même, peut-être que cette proposition est suivie de mimiques faciales suggestives sur le caractère peu innocent de la proposition.  C’est aussi le manque d’exposition sociale et le fait de ne pas avoir de ressource (amis, pros) pour en parler qui peut faire prendre une situation malveillante pour une situation « normale ».

Lorsque moi-même je subissais un harcèlement moral, j’avais bien des signes physiques, des maux de ventre en présence d’un tiers et toujours le même. Mais je ne comprenais pas le lien, ni même l’idée que j’étais dans cette situation. C’est une des raisons qui a fait que je ne voulais plus voir personne pendant de nombreuses années, cette (sur)généralisation de situations de malveillance

2) Définition de la situation malveillante

C’est finalement là la plus grosse problématique, car si certaines situations malveillantes sont objectives (agressions, agressions sexuelles), d’autres sont plus insidieuses. Prenons cette image assez éclairante de la grenouille que l’on fait bouillir, on augmente petit à petit la température de l’eau et elle ne ressent la douleur, qu’une fois la mort venue. Il est donc difficile de se dire « je suis en situation de harcèlement » et surtout d’envisager quand cela a commencé. Cela peut être une brimade simple au départ mais qui devient répétitive, une petite moquerie, qui peu à peu s’amplifie parce que la personne autiste n’a pas la réaction attendue ou que sa réaction est renforçante pour ses bourreaux.

Je précise qu’ici, je ne fais pas de la personne autiste le coupable. Simplement, c’est une règle comportementale. Si vous vous bouchez les oreilles quand un bruit survient, certaines personnes mal intentionnées pourraient vouloir cette réaction et vous crieraient dans les oreilles, alors qu’être stoïque aurait cassé le comportement

Voici quelques critères qui peuvent faire dire « je suis dans une situation malveillante » :

  • Répétition, longueur  (une moquerie peut être acceptable, mais 10 par jour devient du harcèlement)
  • Illégalité (la personne vous rackette, vous vole)
  • Impact sur la personne qui la subit (vous souffrez de ce qu’il se passe)
  • Violence des actes (vous êtes agressée)
  • Consentement non donné (vous n’avez pas donné votre consentement vis-à-vis d’un acte subi, rien que prendre votre bureau et peu à peu s’y installer est de la malveillance si personne ne vous a demandé au préalable).

Et puis, il y a une part de subjectivité dans la malveillance, évidement face à une personne hyperacousique, faire du bruit n’aura pas le même impact que faire du bruit devant une personne typique. Par exemple, ici quelque chose qui m’arrive assez souvent ne pas savoir dire non et me retrouver dans des situations inextricables (« 18 kilos de sons, écoute la basse… ») :

https://www.youtube.com/watch?v=OmEx0mpHFG4&t=69s

 

3) Suis-je dans une situation de malveillante ?

Il est difficile d’identifier tous les comportements qui peuvent souligner que vous êtes dans une telle situation:

La liste n’est pas exhaustive mais ces points  doivent alerter la personne autiste ou ses amis et nous verrons dans la gestion et dans la prévention que lister les personnes ressources est primordial.  Je propose ici une vidéo de Bref qui me semble assez représentative du besoin de ressasser, du caractère obsédant que peut avoir une situation que l’on a subie qui est un des points qui doivent alerter:

https://www.youtube.com/watch?v=yQbvhuSlOt8
Le caractère obsessionnel que prend une situation malveillante vécue

Je vous propose ici un questionnaire, n’hésitez pas à le passer, peut-être êtes vous dans cette situation ? Juste pour expliquer, les personnes autistes peuvent avoir du mal à exprimer leur ressentis, déjà à l’identifier. Aussi au lieu de proposer un questionnaire classique, je pense qu’il faut partir sur des changements objectifs et aussi des questions où l’on répond seulement par oui ou par non. J’invite les professionnels qui veulent faire de même à garder ce type de structure qui me semble la plus appropriée dans l’autisme.

Un questionnaire de ce type pourra aider à prendre conscience de la situation

 

En conclusion : 43,6% des personnes autistes ont vécu un harcèlement contre 10% de la population typique, 88% des femmes autistes disent avoir connu des violences sexuelles au cours de leur vie, Taux de suicide trois fois supérieur chez les personnes autistes doivent inciter à agir sur ces questions.

Pour agir, il faut donner aux personnes autistes et ça devrait être le minimum, les moyens d’identifier les situations à risque. Une fois identifié, et si tel est le cas aujourd’hui, je mets des numéros en fin d’article pour agir, mais le conseil le plus certain est de fuir sur cette situation sans plus attendre si vous le pouvez.

N’hesitez pas à commenter via facebook, si besoin, beaucoup de professionnels lisent la page Aspieconseil et peut-être y trouverez vous de l’aide.

La version vidéo de cet article :

https://youtu.be/JkjDazVDYLM

 

 

Les agression sexuelles chez les femmes autistes : https://www.lefigaro.fr/actualite-france/2019/04/02/01016-20190402ARTFIG00041-la-souffrance-invisible-des-femmes-autistes-victimes-de-violences-sexuelles.php

Le harcèlement travaillé par l’excellent site comprendre l’autisme:

https://comprendrelautisme.com/le-harcelement-scolaire-chez-les-personnes-autistes/

Des numéros au cas où (notre gouvernement se limite aux plateformes et aux numéros verts, mais ça peut aider malgré tout) :

3020 : Harcèlement scolaire
119 : pour les personnes vicitimes de viol ou d’agression sexuelles
3919 : le numéro dédié aux violences conjugales.

9 Comments

  1. Bonjour,
    Je prends très tôt le clavier pour vous parler de ma situation alors que je suis au milieu d’une angoisse. Ce n’est pas très malin. Tant pis.
    J’ai peur que ces personnes malveillantes pour moi soient ma famille la plus proche. D’une part, est-ce possible? D’autre part, comment faire? Nous sommes à l’approche des fêtes et je vais bientôt être de nouveau en leur présence. Bien que je ne les prend pas volontairement malveillants, le fait est que je me sens mal quand je dois me rendre chez eux. J’ai beaucoup d’appréhension et des pensées très intrusives sans fond logiuqe, des angoisses récurrentes sur lesquelles je ne peux rien et qui ne font que de se présenter à chaque fois que je dois me rendre chez eux. Je ressens le besoin d’en parler mais je ne sais pas à qui et comment. Cela commence à me bloquer dans mes études et dans ma projection dans l’avenir,loy je constate que je souhaiterai habiter dans un pays étranger afin d’avoir à les voir tout au plus une à deux fois par an, même moins.
    Je me trouve terriblement mauvaise de penser ainsi à mes proches mais je ressens comme une sorte de d’ange si je reste trop longtemps chez eux et l’idée de passer une semaine prochainement à leurs côtes me rend anxieuse et triste.
    Je ne sais pas ce que je dois en penser ou ce que je dois faire. Suis-je si peu reconnaissante de ma famille? Et dans le même temps comment faire pour atténuer une impression qu’ils m’ont négligée et qu’ils ont donc été malveillants avec moi?

  2. Bonjour.
    Mais que faire quand on est adulte asperger et que le harcelement vient des voisins directs? A tour de rôle, plusieurs fois par jour, des moqueries sous ma fenêtre avec mon nom cité, régulièrement des venues à plusieurs en sonnant (avant j’ouvrais et je subissais des menaces le doigt tendu on me disait de me fémier, que je ne tiendrai pas le coup et que je déménagerai, etc), maintenant j’ai dévranché ma sonnette et je n’ouvre plus. Ma voiture a été cassée (un plainte est en cours auprès du procureur pour destruction volontaire du bien d’autrui). Quand il passent sous ma fenêtre ils poussent d’un seul coup des cris puis plus rien. Le we dernier, ils sont venu sous mon patio devant ma porte d’entrée faire uriner leur chien sur l’enrobé et sur mes pots de fleur. etc (je ne peux pas porter plainte, je l’ai signalé à la mairie qui est mon bailleur et se désengage en me disant de me débrouiller avec les voisins). Il se connaissent tous depuis toujours. En début d’année une personne de la mairie m’a appelé pendant 2 heurs un soir pour me convaincre de partir car j’étais le problème : ma vie sur place est simple, je ne sors pas au maximum 3x par mois, je me fais livrer mes courses, je suis silencieuse et propre. Je n’embête personne et suis très discrète, voire invisible, et c’est cela qui pose problème. J’ai prévenu en arrivant que je suis handicapée, ce logement m’a été attribué sur ce critère. Les voisins (2 couples, et 2x une mère célibataire avec 1 et 2 enfants et les compagnons de passage) m’ont promis de me faire craquer et partir parceque je ne correspond au profil de leur groupe soudé. Cordialement

      • Hier mon bailleur, M. Le Maire est venu chez moi suite au rv demandé par ses soin afin « de discuter des différents désagréments que je rencontre ». (Rv 10h00 – 10h30).
        (Infos+ : Je vis dans le noir depuis le 14 janvier dans la chambre (panne de volet), et dans le salon/accès extérieur terrasse (panne de volet) depuis le 13 mars. 1ère proposition de rv pour contat de panne le 24 mars.)
        M. Le Maire arrive à 10h12, je lui présente l’amie dont la présence était prévue (elle est mon décodeur de neurotypique), puis d’emblée il m’informe que mon fonctionnement les dérange.
        La mairie n’accepte pas que j’ai besoin qu’on me prévienne avant de passer chez moi, ils souhaitent venir à l’improviste.Il me reproche de ne pas pouvoir ouvrir ma porte à leur convenance.
        M. Le Maire m’indique qu’ils me trouvent impatiente concernant les volets à réparer (depuis janvier et début mars) et que je ne suis pas une priorité.
        M. Le Maire conclue en me demandant à 2 reprise d’aller vivre ailleur car mon fonctionnement organisé ne correspond pas à leur faàon de faire.
        Si je n’avais pas eu de témoin à cet entretien, j’aurais moi-même douté de ce que j’ai entendu.
        J’ai rappelé à M. Le Maire mon entière disponibilité aux rv fixés mais mon incapacité totale à pouvoir ouvrir à l’improviste pour les raisons suivantes : d’une part, je vis avec un casque pour me reposer (autisme ALD30), d’autre part je me repose des conséquence d’une maladie orpheline multi opérée (ALD30) et ne peux bondir du canapé à chaque coup de sonnette.
        J’ai rappelé ma seule et unique demande depuis mon emménagement : pouvoir jouir paisiblement pleinement de l’intégralité des espaces que je loue et que j’entretien, sans invasion, casse, destruction ni salissure.
        Il a conclue que mes demande de tranquillité étaient du harcèlement et a réitéré sa pressante demande de me voir libérer les lieux car mon profil les dérange.
        Il a également insisté sur le fait que « lui il travaille » (pardon d’être en invalidité Monsieur le Maire… et en même temps, c’est vous qui avez décidé de me rencontrer).

        Voilà une belle forme d’acceptation des différences. Que dire si un élu ne donne pas l’exemple ni ne protège ses administrés handicapés neuroathypiques.
        Je suis toujours très calme et polie. Très patiente et propre (valorisation de l’espace et entretien intérieur extérieur parfait)

        La bienséance m’a empêché de lui suggérer de remettre en route quelques wagonnets afin de planifier une action groupée de personnes dérangeantes parce qu’handicapées vers des contrées grillagées loins des yeux de tous, afin de lui permettre de ne conserver dans son village que des bien-portants festifs.

        Un peu perdue là…

    • Je vie la même chose ou presque, j’habite au 7ieme étage de mon immeuble ( il n’y a pas d’autre étage après ) cela fait seulement 8 mois que j’y réside.

      Au départ c’était mon voisin de gauche, avec son Subwoofer ( basses sonore de speaker très fort ) que j’ai partagé au propriétaire par courriel incluant les vidéos, cela a été réglé rapidement.

      Récemment ( 2 mois environ ) un nouveau voisin à ma droite a commencé à utiliser mon mur de chambre pour lancer des balles rebondissantes ou de tapotements de doigts jour et nuit entière, ensuite j’ai partagé ce nouveau problème au propriétaire.

      2 jours après, le problème c’est empirer, je suis en sandwich entre les deux voisins fautifs, j’entends des pas de marches rapides et des claquements de portes, ces voisins s’invitent afin de me faire craquer, ils utilisent les murs qui sont collés à la mienne afin de lancer des balles, de claquer les armoires et de frotter les chaises exagérément et longuement.

      Et quand je n’entends plus rien à mon étage, j’entends des coups de balai et des balles sous mes pieds ( voisin du bas au 6 ieme étage ).

      Ce voisin du bas est devenu harcelant en temps pleins, ils lancent des balles egalement, via mon mur de chambre, ce mur longue vers le bas, qui fait son mur de chambre, vous comprenez la situation, mes deux voisins ( moi la tomate dans le sandwich et eux les tranches de pains ) et mon voisin. Du bas, sont tous ensemble pour me faire craquer, ils c’est leurs passe-temps.

      Je dois attendre 20 jours car mon propriétaire doit gérer plusieurs plaintes car il gère plusieurs édifices à la fois, je tiens à préciser que je suis du Canada, nous avons pas les même règlement mais le même harcèlement. Je peux comprendre ce que vous ressentez, je me fais livrer mon épicerie chez moi également et mon livreur doit sonner pour entrer, et mes voisins se sont précipité vers la sonnette par la suite pour me harceler avec ma sonnette.

      Je vous comprends et c’est vraiment répugnant ces gens.

  3. Courage à toi Lili, je vis une situation conflictuelle avec mes voisins également, même si ça n’a rien à voir comparé à toi. Suite à un enchainement de crise autistique (cris suite à une situation de stress ), j’ai dû dire à mon voisin que j’étais autiste et que j’allais faire de mon mieux pour arrêter. Depuis 4 mois, je ne fais plus de crise mais j’ai entendu mon voisin dire qu’il avait peur de moi et ma voisine court dès qu’elle me croise. C’est vraiment pas marrant à vivre. Je pense à déménager parce que ça commence à avoir des conséquences sur ma santé mentale.

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